Tristan Scohy est un journaliste vidéaste qui travaille pour le site Internet du journal L’Equipe et a réalisé des vidéos auprès de grands noms du milieu sportif. Ayant toujours été passionné par le voyage, c’est aux côtés de sa compagne que Tristan a décidé de prendre un congé sabbatique cette année et de partir pour un tour du monde de 14 mois. Aujourd’hui, nous inversons les rôles et Tristan devient celui qui répond aux questions. Nous vous laissons découvrir cette interview drôle, touchante et fascinante pour en apprendre plus sur son parcours passionnant.
Tristan, peux-tu te présenter et nous raconter ton parcours ?
Je suis passionné par le football depuis mon enfance, mais j’ai toujours eu la paresse de préférer déguster les charlottes aux framboises de ma mère plutôt que d’aller aux entraînements après les cours. Aussi, j’ai la malchance de ne pas être le plus technique des joueurs de foot. Lucide sur mes (in)capacités, je me suis donc orienté vers le journalisme, réalisant par la suite un rêve de gosse en rejoignant L’Equipe dans la foulée de mon diplôme. J’y travaille depuis bientôt 8 ans, au sein du service vidéo, et je peux ainsi continuer de manger des charlottes aux framboises à ma guise, sans -trop- culpabiliser.
Pourquoi as-tu décidé de mettre ta carrière de journaliste entre parenthèses pour te lancer dans un tour du monde de 14 mois ?
J’ai le ressenti depuis quelques temps que mon métier est moins intéressant qu’il a pu l’être auparavant. Ce n’est pas propre à l’entreprise dans laquelle je travaille mais à la plupart des médias, aujourd’hui. Me concernant, ce qui m’anime dans ce métier c’est partir en reportage, rencontrer des gens et raconter des histoires humaines. Or, ces dernières années, j’ai passé beaucoup -trop- de temps devant l’écran de mon ordinateur. J’ai donc ressenti un fort besoin d’évasion, de mouvement, de découvertes. L’idée de partir une année a germé… Puis « on a qu’une vie ». Alors j’ai mis le rêve de gosse entre parenthèses pour réaliser celui d’adulte.
Comment as-tu préparé ce tour du monde ?
À l’arrache ! Nous devions partir en septembre 2019, le temps d’économiser suffisamment et de bien préparer notre itinéraire. En septembre 2018, je tombe sur une annonce pour un partenariat avec un superbe hôtel au Costa Rica, dans une péninsule isolée, entouré par la jungle et l’océan. Cet hôtel cherchait un vidéaste pour trois mois. J’ai postulé, j’ai été pris, mais on m’a dit : « On a besoin de toi en janvier ». Il m’a fallu convaincre Laura de me suivre dans cette folie, et au final nous ne regrettons rien ! Nous sommes partis avec un aller simple et des rêves plein la tête.
Tu as entrepris ce tour du monde avec ta compagne, cela a-t-il été facile de se mettre d’accord sur les étapes du voyage, sur les activités que vous faites sur place… ?
Assez basiquement, j’ai d’abord demandé à Laura de dresser la liste de tous les pays qu’elle rêve de visiter dans sa vie. J’ai fait la même chose de mon côté. Nous en avions une dizaine en commun, ce qui a facilité les choses pour le choix des destinations. Pour les activités, ça a toujours été facile car nous avons les mêmes goûts, puis on essaie aussi de surpasser nos peurs. J’ai le vertige, cela ne m’a pas empêché de faire de la tyrolienne au Costa Rica (en poussant de ridicules petits cris de terreur de temps à autres, certes) ou de monter au sommet de toutes sortes de tours, malgré les jambes qui tremblent parfois un peu.
En parlant de voyage en duo, quels sont selon toi les avantages et inconvénients de voyager en couple ?
Tout d’abord, cela m’a évité d’investir dans des traceurs GPS et des caméras miniatures pour surveiller les moindres faits et gestes de Laura à Paris pendant que je me tape en solo le trek du Tongariro en Nouvelle-Zélande, dans un froid glacial et au milieu de nulle part.
Ensuite, mon anglais étant médiocre, j’avais besoin d’une interprète pour traduire chacun de mes désirs. Mon espagnol, aussi, est tout juste passable. Je connais juste les règles élémentaires de survie, du type : « Hola, un pollo asado por favor, y un mojito con una doble ración de ron ! ».
Enfin, voyager seul c’est super, mais cela peut vite devenir ennuyeux, bien que j’apprécie beaucoup ma propre compagnie. Avoir Laura à mes côtés, cela me permet, lorsque l’ambiance est monotone, de balancer la petite pique qui va l’irriter et la mettre en furie ! Ajoutant ainsi un peu de vie aux journées les plus calmes.
Plus sérieusement, l’inconvénient de voyager en couple c’est qu’on ressent parfois le besoin d’être seul. Mais on s’octroie ce temps. Par exemple, demain, Laura prend l’après-midi pour faire ses « trucs de fille », passer du temps dans des magasins et nous ruiner avec des crèmes qui lui permettent d’imaginer qu’elle ne sera jamais ridée. Pendant ce temps, je pourrai enfin me consacrer à ma passion : la lecture d’ouvrages de physique quantique concernant la notion de dualité ondeparticule. Ou sinon, j’irai regarder un match de foot anglais dans un pub, avec une pinte et une planche de charcuterie. J’hésite encore. Un peu.
Jusqu’ici, quel a été ton meilleur et ton pire souvenir lors de ce grand voyage ?
Mon pire souvenir aura été la perte d’une sacoche dans un bus, lors de notre dernier jour au Costa Rica. Rien de tragique, mais cette sacoche contenait ma carte bancaire, mon permis de conduire, mon carnet international de vaccination, mon permis de conduire international, ma carte vitale, etc. Or, le lendemain, nous nous envolions pour le Mexique où j’avais loué une voiture pour un mois. La carte bancaire en question allait nous être demandée, ainsi bien sûr que le permis de conduire. La nuit a donc été courte, mais tout s’est arrangé par la suite, avec un peu de « bla bla » ! Là où ça s’est compliqué, c’est pour le carnet jaune de vaccination. Comme le vaccin contre la fièvre jaune était obligatoire pour entrer dans certains des pays que je prévoyais de visiter, j’ai dû me faire vacciner une nouvelle fois, au Mexique. J’ai bien demandé à l’hôpital un certificat de vaccination en deux versions, l’une en anglais et l’autre en espagnol. Des mois plus tard, alors que je m’apprêtais à prendre l’avion à Buenos Aires en direction de l’Afrique du Sud, l’hôtesse d’accueil m’explique que le carnet jaune est obligatoire et qu’un simple certificat comme le mien n’est pas suffisant. En conséquence, je ne peux pas embarquer. C’était l’angoisse car une partie de ma famille était justement dans un avion depuis la France pour nous rejoindre en Afrique du Sud, j’allais devoir « abandonner » tout le monde. Puis après l’Afrique du Sud nous prévoyions de visiter d’autres pays nécessitant aussi ce carnet… Avec un certain nombre de réservations (logement, véhicules, etc.) déjà effectuées et payées. Finalement, après avoir convoqué dans mes prières tous les dieux de la Terre et de l’univers et m’être mis à genoux devant Sainte Hôtesse d’Accueil, son supérieur est arrivé et nous a dit d’embarquer, à l’ultime seconde. Plus de peur que de mal…
Des meilleurs souvenirs, j’en ai des dizaines… J’ai quand même envie de mentionner notre aventure en Afrique australe, où nous avions loué un 4×4 avec tente sur le toit. Ça a commencé étrangement car nous avons appris (grâce à la vidéosurveillance de notre hôtel) que nous étions suivis dans Windhoek par deux véhicules visiblement mal intentionnés et que nous avons échappé à un braquage imminent, uniquement parce que nous sommes arrivés pile à temps dans le garage sécurisé de l’hôtel. Par la suite, rien à signaler à part de grands moments de bonheur, entre les dunes rouges sublimes de Sossusvlei en Namibie, des safaris merveilleux, des croisières au coucher de soleil sur la rivière Chobe au Botswana, ou encore la découverte des majestueuses chutes Victoria au Zimbabwe, d’abord par les airs puis au sol, à l’aube le lendemain. Et le sentiment de liberté totale avec le camping chaque soir, les barbecues en pleine nature…
Que représente le voyage pour toi, et comment le définirais-tu ?
Le voyage, pour moi, c’est avant tout la découverte. Découverte de l’autre, de cultures différentes, de façons de penser et de vivre parfois aux antipodes des nôtres, découvertes de paysages qui nous surprennent ou nous impressionnent. Découverte des cuisines du monde, pour un gourmand comme moi c’est une joie continue. Mais je crois que le voyage, c’est aussi -et surtout ?- une découverte de soi-même.
Quels pays as-tu eu l’occasion de découvrir ? As-tu eu un coup de cœur pour une destination en particulier ?
Plein de pays ! Du Pérou au Japon, en passant par l’Afrique du Sud et l’Ouzbékistan. J’ai adoré des endroits très différents, comme l’Inde, le Costa Rica ou la Nouvelle-Zélande. Mais si je devais retenir un seul coup de coeur, ce serait l’Afrique australe.
D’après toi, quels sont les 3 objets indispensables à emmener dans son sac à dos lors d’un voyage comme le tien ?
Me concernant, car c’est ma passion, un appareil photo-caméra est incontournable. Je l’ai toujours avec moi. Un ordinateur portable pour éditer les photos et monter les vidéos. Puis une carte, pour me repérer en toute circonstance. Je peux en prendre un 4e ? Non ? Vraiment pas… ? Vous êtes pas cool, Shanti Travel… Bon… Alors je rajoute de la musique. Et j’enlève la carte. Car voyager, c’est aussi se perdre.
Ton tour du monde s’achève bientôt, quels sont tes projets lors de ton retour en France ?
Reprendre mon travail. J’appréhende, évidemment, le fait de retrouver une vie sédentaire. De me lever tous les matins pour rejoindre mon bureau plutôt que me réveiller en me demandant quelle aventure je m’apprête à vivre. Mais travailler dans cette entreprise m’offre beaucoup d’avantages et j’en suis conscient. Voyager permet aussi de relativiser beaucoup de choses. Seule véritable angoisse : devoir de nouveau endurer la présence de certains collègues supporters de l’Olympique de Marseille ou de Saint-Etienne. Ça, c’est dur. Croyez-moi.
Quelque chose nous dit que tu ne comptes pas t’arrêter là… As-tu des nouveaux projets de voyage pour le futur ?
Je suis encore dans ce voyage que je pense déjà aux prochains ! Effectivement, voyager est devenu une drogue dure, je suis accro ! De nombreuses destinations me font de l’oeil : le Groenland, le Sri Lanka, la Mongolie, Bali, le Népal, la Patagonie, le Moyen Orient, et plein d’autres… Avec Laura, nous avons profité de ce tour du monde pour nouer un grand nombre de partenariats dans le domaine du tourisme, avec des hôtels, des offices de tourisme, des activités, des agences de voyages… Nous produisons du contenu (photos, vidéos, réseaux sociaux) en échange de prestations offertes. Ça a été une façon pour moi de garder la main en ce qui concerne l’aspect technique de mon travail, mais aussi de vivre des choses que nous n’aurions pas forcément eu les moyens (ou l’idée) de nous offrir. Nous avons réalisé une cinquantaine de partenariats de ce type, dans quasiment tous les pays que nous avons visité. Avec le temps, l’idée de reproduire cela à une échelle plus ambitieuse, dans les années à venir, a germé. Pourquoi ne pas la développer à l’avenir ? Que le voyage ne soit plus seulement une passion, mais devienne aussi notre travail ! Ce qui est sûr, c’est que durant ce voyage de 14 mois, nous avons vu beaucoup de paysages de nature mais aussi de lieux emblématiques de la civilisation humaine, donc hyper touristiques, comme le Taj Mahal, le Macchu Pichu, les pyramides mayas, les temples d’Angkor, et j’en passe. Pour nos prochains voyages, nous voulons privilégier des destinations « hors des sentiers battus », moins touristiques, moins célèbres, mais pas forcément moins intéressantes…
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Crédits photos : Tristan Scohy